Amendements sur le changement d’état civil des trans rejetés au Sénat : l’Inter-LGBT dénonce le discours gouvernemental et propose d’accompagner les parlementaires dans leurs travaux

COMMUNIQUE DE PRESSE DU 20 SEPTEMBRE 2013

Trans flagLes amendements déposés sur la loi égalité femmes-hommes au Sénat au sujet du changement de sexe à l’état civil pour les personnes transidentitaires ont été purement et simplement rejetés le 17 septembre 2013, sous la pression du gouvernement. Ce dernier propose en échange de travailler la question dans une loi sur la simplification du droit au 1er semestre 2014.

L’Inter-LGBT prend acte de cette séquence, avec énormément de déception. Une fois de plus, la prise en compte par notre représentation parlementaire du problème que les associations trans et LGBT lui soumettent depuis des années est ajournée. Une fois de plus, l’urgence qu’il y a à légiférer pour protéger la dignité des personnes transidentitaires et lutter contre leur première source de précarité sociale n’est pas entendue.

Des amendements rejetés sur la base d’arguments qui cachent mal le manque de volonté politique du gouvernement en la matière

L’inter-LGBT dénonce l’inexactitude des arguments renvoyés par le gouvernement. Légiférer sur le changement de sexe à l’état civil ne peut pas être considérer comme un « cavalier législatif », mais entre pleinement dans le cadre d’un loi portant sur l’égalité entre les genres. La directive européenne 2006/54/CE1 sur l’égalité, la Halde2 en 2008 et le Défenseur des Droits3 en 2012 le rappellent toutes très clairement dans leur délibérations soutenant les personnes trans discriminées. En tant que Ministre des Droits des femmes, Mme Vallaud-Belkacem a été chargée d’une mission nationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie et a pu à cette occasion constater les liens structurels entre le sexisme et les discriminations subies par les personnes transidentitaires.

Comment interpréter ce report après que la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme – saisie par le gouvernement même – a rendu sur ce sujet le 27 juin 2013 un avis favorable à une démédicalisation totale et une déjudiciarisation partielle du changement d’état civil ? Après que le gouvernement a encouragé publiquement fin 2012 les sénateurs et sénatrices à travailler sur le sujet, pour certain-e-s collégialement ? Sinon que le courage politique manque cruellement à un gouvernement qui ne semble pas comprendre que des vies de citoyen-ne-s précarisé-e-s en dépendent.

31 ans après la proposition de loi du sénateur Henri Caillavet tout démontre qu’il est impérieux et urgent de lutter contre la précarité des personnes trans et que cette tâche ne doit être différée sous aucun prétexte. Stop à l’aléa des appréciations de la jurisprudence pour obtenir un changement d’état civil !

Depuis plus de 40 ans, l’absence du cadre d’une loi pour le changement d’état civil des personnes trans les soumet à l’aléa de l’appréciation de la jurisprudence par les juges du fond ainsi qu’au bon vouloir du pouvoir médical, ce qui entraîne de grandes discriminations sur le territoire et favorise le « forum shopping » juridique ainsi que la précarité de ces personnes.

L’Inter-LGBT s’inquiète du véhicule législatif proposé par le gouvernement et privilégie les propositions parlementaires

La méthode d’élaboration des procédures de changement de sexe à l’état civil qui va découler du cadre que nous propose aujourd’hui le gouvernement sera déterminante. L’Inter-LGBT souhaite voir privilégiées des propositions parlementaires sur le fond du dossier et non pas laisser l’avenir des personnes trans entre les mains des services de l’état civil du ministère de la Justice, services qui sont les principaux responsables du laisser-faire jurisprudentiel qui précarise les trans depuis plus de quarante ans.

L’Inter-LGBT rappelle que la presque totalité des organisations LGBT, ainsi que l’Inter-LGBT elle-même, ont signé un communiqué en juillet 2013, initié par le collectif Existrans, appelant à la démédicalisation et à la déjudiciarisation totale de la procédure, principe que l’Argentine a adopté en 2012. L’Inter-LGBT entend que des adaptations doivent être trouvées afin qu’une telle mesure s’intègre dans notre droit, sans sacralisation d’une doctrine juridique conservatrice, en revanche elle affirme que l’absence de loi protectrice envers les personnes transidentitaires constitue un drame humain pour des dizaines de milliers de citoyen-ne-s dans notre pays.

L’Inter-LGBT propose un rendez-vous aux sénatrices à l’origine des amendements rédigés dans le cadre du projet de loi sur l’égalité femmes-hommes pour échanger sur les enjeux de droit et pour partager avec elles notre souhait de voir converger une solution coordonnée.

L’Inter-LGBT demande à être reçue par le gouvernement pour qu’il précise le contenu et les modalités d’élaboration de la future loi sur la simplification du droit.

Contact presse : Nicolas Gougain, Porte parole de l’Inter-LGBT, 06 77 87 37 00, nicolas.gougain (at) inter-lgbt.org

P.-S.

1 La directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail (refonte) rappelle, en son considérant 3, que « la Cour de justice a considéré qu’eu égard à son objet et à la nature des droits qu’il tend à sauvegarder, le principe d’égalité de traitement entre les hommes et les femmes s’applique également aux discriminations qui trouvent leur origine dans le changement de sexe d’une personne ».

2 Délibération n°2008-29 du 18 février 2008 et délibération n°2008-190 du 15 septembre 2008

3 Décision du Défenseur des droits n°MLD 2012-22