MONKEYPOX : QUE FAIT LE GOUVERNEMENT FACE À LA MONTÉE DE L’ÉPIDÉMIE ET LA SOUFFRANCE DE NOTRE COMMUNAUTÉ ?

Alors que le Monkeypox fait des ravages en France depuis 2 mois avec un nombre de cas confirmé et déclaré au 19 juillet 2022 de 1453, l’Inter-LGBT s’insurge face à l’inaction, le manque de préparation et de transparence du gouvernement.

Le 19 mai 2022 était détecté le premier cas en France de variole du singe plus couramment désigné sous son nom anglais Monkeypox. Deux mois plus tard, 15453 cas étaient confirmés en France par les autorités sanitaires.

Cette épidémie touche très majoritairement (plus de 9 cas sur 10) des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH). Pour certain·e·s d’entre nous, la nouvelle a fait ressurgir le traumatisme des années sida. Pour cette raison, la plupart des associations LGBTQI+ ont exprimé la crainte d’une nouvelle stigmatisation sur la base des comportements sexuels des HSH. Comme le VIH/sida, ce virus (qui se transmet essentiellement par des contacts directs avec la peau d’une personne porteuse de lésions, y compris lors de relations sexuelles) n’est pas une « maladie des gays ». Les HSH ont été les premiers touchés, et pour éviter que l’infection ne se propage bien plus largement, une action ciblée auprès de cette communauté est engagée avec des messages adaptés.

Il est évident que sur ces bases, la parole homophobe a des arguments tout trouvés. Nous les condamnerons systématiquement. Au-delà, du caractère insupportable des attaques dont la communauté LGBTQIA+ est encore trop la cible, les jugements en moralité n’ont jamais été efficaces en terme sanitaire. Dans ce contexte, l’Inter-LGBT rappelle le droit à chacun·e de vivre sa sexualité pleinement avec le nombre de partenaires qu’ils ou elles souhaitent, tout en prenant en compte la réalité de l’épidémie. À partir de ce principe, l’Inter-LGBT se prononce en faveur d’une prévention accrue, factuelle et non jugeante, auprès des personnes exposées, alors que trop de retard a été pris par frilosité, laissant l’épidémie courir.

En ce sens, même si l’épidémie actuelle n’a fait aucun décès en Europe et que les hospitalisations sont faibles, ses conséquences peuvent être graves, tant d’un point de vue clinique que de la stigmatisation dont souffrent déjà les victimes. Nous n’ignorons pas que la variole (dont le Monkeypox est un « cousin ») étant considérée comme totalement éradiquée, sa vaccination n’est plus obligatoire en France depuis 1979 et les rappels ne sont plus obligatoires depuis 1984. Cependant, il existe depuis 2006 un Plan national de réponse à une menace de variole avec la constitution d’un stock de vaccins suffisant pour l’ensemble de la population dont l’usage pourrait être envisagé lors de la survenue de nombreux cas simultanément sur le territoire français (niveau d’alerte le plus élevé). La gestion de ce plan est confiée au Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, qui oppose le « secret-défense » pour refuser de communiquer toute information sur les stocks de vaccins disponibles. L’inter-LGBT exige la levée immédiate de celui-ci, cette information n’ayant rien à voir avec la défense nationale mais tout à voir avec la santé publique.

L’inter-LGBT interroge le ministère de la Santé sur l’état de ce stock et sur le nombre de doses déjà sorties et qui vont sortir de celui-ci pour assurer efficacement la vaccination des populations exposées à l’épidémie actuelle de Monkeypox, alors que la France ne fait pas partie des pays qui bénéficieront de la commande de 110 000 doses effectuée par l’Union Européenne. Alors que l’Allemagne a commandé fin mai 240 000 doses de vaccin antivariolique, à quelle hauteur se portent les commandes effectuées par la France aux laboratoires produisant le vaccin et quand seront-elles livrées et distribuées aux différents centres de vaccination ? Serions-nous à nouveau face à un manquement grave de la part des pouvoirs publics à l’instar des masques de protection lors de la pandémie de Covid ?

De plus, et suite à l’avis de l’HAS du 8 juillet 2022 qui élargit la vaccination :

  • Aux hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) et les personnes trans rapportant des partenaires sexuels multiples ;
  • Aux personnes « en situation de prostitution » ;
  • Aux professionnels des lieux de consommation sexuelle, quel que soit le statut de ces lieux.

Nous constatons par de nombreuses remontées les difficultés à prendre rendez-vous. La demande est forte, et on ne pourra pas dire que les HSH font preuve d’irresponsabilité. Pourra-t-on en dire autant des autorités sanitaires ? Annonce de l’élargissement de la vaccination non préparée en amont, livraisons de doses de vaccin insuffisantes, circuits d’approvisionnement désorganisés, lieux de vaccination insuffisants, créneaux indisponibles sur Doctolib. Le manque de coordination entre les agences régionales de santé, la DGS et Santé Publique France est manifeste, au détriment des HSH qui ne peuvent compter que sur eux-mêmes par les réseaux sociaux pour trouver des moyens pour obtenir un créneau de vaccination.

L’Inter-LGBT déplore l’absence de modélisations épidémiologiques qui sont pourtant essentielles en matière de lutte contre la diffusion des virus. Elle dénonce également le manque de moyens, humains ou financiers, dont bénéficie la recherche publique sur les pandémies et maladies émergentes.

La vie d’un HSH a-t-elle moins de valeur que celle d’une personne à risque pour la Covid ? L’égalité des droits s’arrête-t-elle aux portes de l’hôpital ? La situation est urgente et il est temps de réagir avant qu’elle soit incontrôlable. Faut-il rappeler que le Monkeypox est une maladie qui peut être potentiellement mortelle ?

Enfin et parce que le Monkeypox est une maladie hautement contagieuse, nous demandons que soit élargie la vaccination à tous les HSH, les lieux de convivialité LGBT sans consommation sexuelle pouvant, par leur promiscuité, favoriser la contagion par le virus.

Nous demandons que les opérations de vaccination et de dépistage se généralisent dans une démarche également tournée vers les publics précaires ou éloignés des structures de soins traditionnelles en engageant sans délai des opérations « hors les murs ».

Nous demandons également à ce que la prise en charge des patients présentant de potentiel symptôme au MKP soit facilitée afin de réduire le diagnostic qui est aujourd’hui en médiane 6 jours, que les professionnel·le·s du 15 soient mieux formé·e·s. aux réponses à apporter, comme les médecins généralistes, pour éviter les errements de diagnostics, alors que les CEGIDD sont les endroits où le diagnostic est le plus sûr et rapide.

Nous demandons que les patients traités soient suivis régulièrement, chaque semaine, après un diagnostic positif, pour évaluer l’évolution de la maladie et évoluer l’état psychologique lié à la période d’isolement prescrite de 21 jours, qu’une harmonisation des protocoles de soins soit discutée entre médecins avec le concours des patients, pour apporter une réponse adaptée et croissante aux douleurs provoquées par  les lésions, pour le traitement quotidien par pommades des boutons et aider à leur cicatrisation. Là encore les groupes d’autosupport se montent entre usagers pour échanger sur leur maladie, les symptômes de chacun et les soins quotidiens.

Enfin, l’Inter-LGBT alerte sur l’absence de solutions d’hébergement des personnes ne pouvant s’isoler seules dans leur logement (situation fréquente dans les grandes métropoles) voire sans logement. Les économies de « bouts de chandelle » n’ont pas leur place en matière de santé publique et une prise en charge intégrale et inconditionnelle doit être proposée à chaque cas difficile.

Pour conclure, l’Inter-LGBT demande un rendez-vous rapide avec le ministre de la Santé afin d’obtenir les garanties de la prise en compte des revendications suivantes :

  • Une prévention accrue auprès des personnes exposées,
  • La levée du secret-défense sur les vaccins de 3ème génération de la variole et le volume des commandes et mises à disposition dans les centres de vaccination à l’échelle nationale,
  • L’élargissement de la vaccination à tous les HSH et la réduction du temps de diagnostic,
  • Un meilleur suivi des patients après un diagnostic positif et harmonisation des protocoles de soins.